Jump to navigation
Lu en mars, pas grand-chose. Il y a des mois comme cela, quelques fois par siècle. Confinement oblige, on sort tout le temps, et marcher ou véloter en lisant: hasardeux. À la fête, néanmoins, Godard, Flaubert & Bury. Le reste? Même pas de la littérature.
Lus en février, mi-pluviôse, mi-ventôse, avec les ténèbres faiblement étoilées de son ciel plombé: à quai, sur le pont, embrumés par Turner, c'est en tâtonnant qu'on arrive à trouver refuge auprès de Guillevic et John Berger. Un peu plus loin, à peine moins fantomatique, Gabriel García Márquez. Pour le dur retour à la réelle réalité, vodka sec: Edward Snowden et Emmanuel Todd.
Comment entamer l'an neuf du bon pied? En faisant comme si. Comme si cela nous concerne pas. Mais en chavirante compagnie, s'il vous plait, des pouilleux des terres bibliques, des poètes que l'oubli a maudit, ou momifiés de mythologies rétroprogessistes, voire encore des égarés du Graal perdus dans le dédale du Parlement.
Décembre a des allures de ligne droite. À tombeau ouvert vers le fade néant de l'année nouvelle. À plusieurs, dans une Oldsmobile fifties décapotée, c'est plus déluré. Sur la banquette arrière, Thomas Hardy entonnant une chanson à boire en duo avec le petit merle de compagnie de Vinciane Despret. Assoupi à la "place du mort", ronflant mélodieusement, J. L. Austin. Sur ses genoux, rêvant à Ulysse, Barbara Cassin. Au volant? Ben personne, tiens! Bagnole hybride, mi-vaisseau fantôme, mi-train fou.
Les couleurs ambrées de novembre ont une feuillage d'une encre bien sympathique qui bruisse de vieux os nous faisant signe, fantômes d'Aragon, de Jünger, de Brecht et de Platonov. L'automne mourant est d'une lecture réveillant d'anciennes berceuses.
Difficile d'imaginer un cas plus inouï que celui de Julian Assange. Il concerne tout le monde. Et tout le monde, ou presque, s'en fout. D'abord, on arrête les Juifs, puis les rouquins, comme on dit...
Je ne sais pas si mes chats savent lire mais quand j'entame un bouquin, l'un deux saute dessus en ronronnant. Queue devant mon nez, arrière-train couvrant la moitié de la page, ça freine un peu. Si c'est Onfray, ce n'est pas bien grave; pour Milner, Byron ou Levi, le quart d'heure académique passé, faut bien se montrer insupportable: pousse-toi un peu, petit poussin. (Réplique instantanée: Je ne suis pas ton petit poussin!).
Septembre a fait croire à un été éternel. Las! Tout comme, Adorno et Horkheimer, à une renaissance socialiste. C'était en 1956. Las! Tout comme Francis Combes, au bonheur sans fin d'une poésie rouge. Las, encore! Sans parler de Chomsky, l'optimiste incurable... Heureusement, Thomas Mann est là pour rappeler que dans tout pape sommeille un hérétique!
Les bouquins apportent la preuve que les esprits parlent. Goethe, c'est une voix douce, un peu fatiguée. Schiller, nettement plus rapeuse, mais pleine d'enthousiasme. Rimbaud? Une voix d'illuminé (et d'encrapulé)! Malraux, secouée de tics nerveux, elle saccade. Tournée générale!
Les juilletistes forment un cortège haut en couleurs. Ruskin attaché au parasol, Babel glissé dans le chapeau, Diderot en guise de guide touristique et Ponge comme irremplaçable GPS portable. Les paradis artificiels sont des escargots en papier